Dimanche 8 avril 1973
A 18h30, depuis Marseille où
habitent mes parents, je pars en autobus à l’aéroport international de Marseille-Marignanne.
L’avion pour Tunis décolle à
19h40. Je suis impressionné, car c’est la première fois que je prends l’avion.
Nous faisons une escale à
Bastia, en Corse. Personne ne sort de l’avion.
Arrivée en TUNISIE à 22h, à l’aéroport
de Tunis-Carthage.
Ancienne province de l’Empire ottoman,
Je suis accueilli à
l’aéroport par Tayeb, un des
frères d’Hichem. Nous rentrons de nuit à Ez-Zahra,
une ville côtière à 15 km
de la capitale, où habitent Tayeb et sa femme Monia, chez qui je vais loger.
Lundi 9 avril 1973
Lundi 9 avril 1973
A 10h30, Tayeb et moi partons en voiture au port de
En fin de matinée, Hichem m’emmène
avec lui rendre visite à des amis, M.
et Mme Ducauze, coopérants français. Nous rentrons ensuite à Ez-Zahra.
L’après-midi, Hichem, son
cousin Jellel et moi allons
rendre visite à des parents et voisins. Par la suite, nous faisons tous les
trois un tour en voiture à TUNIS et dans les environs, ce qui me donne un aperçu général de la ville et de la région.
De retour à Ez-Zahra, nous
passons la soirée chez Tayeb et Monia. Nous regardons la télévision.
Mardi 10 avril 1973
Mardi 10 avril 1973
Matinée à Ez-Zahra.
J’accompagne Monia faire quelques courses en ville.
L’après-midi, Hichem et moi
rejoignons Tunis en taxi. De là, nous partons en « voiture de
louage » (taxi collectif) jusqu’à Nabeul. La voiture de louage est un moyen de transport fort utilisé par les
Tunisiens. La voiture ne part que lorsqu’elle est pleine.
Nous arrivons chez la mère
d’Hichem, à Nabeul, avenue Mongi
Slim, à deux pas de la mer.
Située au sud de la péninsule du Cap Bon, en bord de Méditerranée (golfe d’Hammamet), Nabeul est
très touristique. La ville est réputée auprès des Européens pour sa plage et
son titre de capitale de la poterie.
Nous allons nous promener
dans la soirée en ville et nous passons la nuit chez la mère d’Hichem.
Petit détail : dans les
maisons arabes, il n’y a pas de papier-toilette dans les WC. Seulement un
robinet et un broc pour se laver à la main ! Il va falloir s’habituer…
Mercredi 11 avril 1973
Mercredi 11 avril 1973
Matinée en ville, à Nabeul, avec un copain d’Hichem : dans le centre, autour de
Nous rentrons à Ez-Zahra en
voiture de louage dans l’après-midi.
Le soir, nous allons prendre
l’apéritif chez des coopérants, puis nous allons manger dans un hôtel avec M.
et Mme Ducauze.
Nous sommes de retour à minuit chez Tayeb et Monia.
Jeudi 12 avril 1973
Jeudi 12 avril 1973
Le matin, je pars pour Tunis avec Hichem. Nous visitons
Nous déjeunons ensuite chez son
frère aîné.
L’après-midi, nous nous
promenons à pied à Tunis : d’abord dans la ville moderne avec l’avenue
Habib Bourguiba et l’avenue de France, puis dans la médina et les souks.
Si l’on n’est pas franchement dépaysé dans les quartiers modernes où le
décor et l’activité sont proches de ceux d’une ville occidentale, en revanche
le vieux centre, marqué par l’architecture coloniale, grouille de monde :
jeunes, vieux, costumes occidentaux, vêtements traditionnels, cireurs de
chaussures et vendeurs de jasmin, mélopées des muezzins, tout cela crée un
tourbillon de vie dans lequel se rencontrent les traditions et la modernité,
l’Afrique, l’Orient et l’Occident.
Nous sommes invités à 20h30
par un autre frère d’Hichem, Norredin (que j’ai connu à Strasbourg). Nous
mangeons tous les trois dans un restaurant, le M’Rabet, dans la médina, au
premier étage d’un ancien café maure.
Je passe ensuite la nuit
dans un hôtel en ville, car Hichem ne rentre pas à Ez-Zahra.
Vendredi 13 avril 1973
Vendredi 13 avril 1973
On est réveillé tôt par l’appel du muezzin…
Je règle ma nuit d’hôtel
avec les dinars tunisiens qu’Hichem m’a échangés contre des devises, et je vais
passer la matinée à Tunis.
Pérégrinations sur l’avenue
Habib Bourguiba, la grande avenue de la ville. Je suis frappé
par le contraste des jeunes filles en mini-jupe côtoyant les femmes voilée et
les hommes en djellaba ou portant la chéchia. Des portraits géants du
« Combattant suprême » trônent aux carrefours. La moindre des
échoppes a son portrait de Bourguiba.
J’attends Hichem au Café de
Paris, sur l’avenue Bourguiba. Bière et olives… tout en observant
l’animation qui règne en permanence.
Je rencontre les Ducauze et,
comme Hichem semble ne pas arriver, je rentre avec eux manger à Ez-Zahra.
Je passe l’après-midi avec
Jellel à Ez-Zahra puis de nouveau à Tunis.
Hichem et moi dormons chez
un oncle au village.
Samedi 14 avril 1973
Samedi 14 avril 1973
Je passe la matinée à Ez-Zahra. Je prépare entre autre mon sac à dos.
A 15h, je prends le train
pour Hammam-Lif. De là, je pars en auto-stop pour un voyage dans le Sud.
Je suis d’abord chargé par
une carriole à cheval qui me sort de la bourgade. Plus souvent, ce sont des
ânes que l’on retrouve attelés au bord des routes.
Pour le reste, l’auto-stop
fonctionne. Les Tunisiens chargent
facilement leurs compatriotes qui n’ont pas de moyen de communication. Une
participation de quelques pièces au voyage sera la bienvenue, même si l’on ne
vous demande rien.
Je parviens à Sousse, une ville portuaire, aux portes
du Sahel tunisien, à 19h. Je dors dans un petit hôtel de la médina.
Dimanche 15 avril 1973
Dimanche 15 avril 1973
Au sommet de la vieille ville, la casbah domine la médina entourée de beaux remparts crénelés. Celle-ci, bâtie sur un coteau, descend vers la mer en un dédale de petites rues et d’escaliers. Je me promène dans les souks et je visite le musée.
L’après-midi, je continue l’auto-stop
jusqu’à El Jem.
On est dans la région des
oliviers. Sur des dizaines de kilomètres, cette contrée plate, écrasée de
soleil, produit des olives.
On le voit de loin, le
gigantesque amphithéâtre romain qui écrase de sa masse les petites maisons
basses du bourg agricole. C’est le plus
grand édifice romain de Tunisie encore debout et l’un des plus grands du monde
romain. Il surpasse les arènes de Nîmes et même celles d’Arles. Il pouvait
accueillir près de 30 000 spectateurs.
L’entrée est payante. Devant
le site, les inévitables dromadaires à touristes, avec photo pour le souvenir…
Je parcours l’amphithéâtre, flânant dans les coulisses et les vieilles pierres.
J’achète à manger dans une
échoppe autour du site ; et je repars en auto-stop.
J’atteins Sfax à 18h.
Grande ville industrielle, deuxième du pays, premier port national,
elle est aussi très polluée.
A mon arrivée, je fais une
promenade en ville. Un petit garçon m’aborde, me propose sa sœur ou
bien… lui-même !
Je recherche un hébergement
pour la nuit que je trouve dans un petit
hôtel de la médina : dans un escalier en colimaçon, une petite chambre
avec un lit aux draps douteux et dont la porte ne ferme pas. Je pousse le lit
contre la porte, au cas où…
Lundi 16 avril 1973
Lundi 16 avril 1973
Au matin, je me promène en ville. C’est une ville d’affaires avec de grands immeubles modernes, mais avec une médina animée, sans agressivité commerciale. Je vais ensuite faire une balade sur les quais du petit port de pêche.
Dans l’après-midi, je
continue vers le sud.
Avec mes cheveux longs qui
tombent sur les épaules, je pourrais, paraît-il, sembler équivoque. Est-ce pour
cela qu’un automobiliste me charge et me fait des avances, la main sur ma
cuisse ? Je fais comprendre que non, pas vraiment…
Le paysage change. Aux
plaines couvertes d’oliviers et aux forêts de chênes verts et de chênes-lièges
succède un paysage plus aride, à la végétation qui annonce le désert.
A 14h30, j’arrive à Gabès, porte d’entrée du Grand Sud qui flirte avec la mer, au bord d’un golfe
qui - rare endroit en Méditerranée - connaît des marées relativement importantes.
Gabès fut un comptoir phénicien
puis une colonie romaine.
Je recherche un hébergement
pour la nuit. L ’auberge
de jeunesse me semble correcte. J’y laisse mon sac à dos et je vais me promener
en ville dans les vieux quartiers. Je visite le Centre de l’Artisanat
puis la mosquée de Sidi Driss, aux colonnes antiques dans la salle de
prière.
Je mange dans un petit
restaurant et je passe la nuit à l’auberge de jeunesse.
Mardi 17 avril 1973
Mardi 17 avril 1973
Au matin, je parcours l’oasis de Gabès en calèche avec un couple de Français et un Australien, rencontrés sur place, jusqu’au village de Chenini. La palmeraie comprend plus de 300 000 palmiers et s’étend sur
Nous revenons à pied par un
sentier sous les palmiers. Nous pique-niquons dans la nature. Un de mes
compagnons essaye sans succès de grimper sur un palmier !
L’après-midi, je poursuis ma
route en auto-stop. On aperçoit les premières « ghorfas » ou
greniers à grain du temps passé.
Je me dirige maintenant par
le sud-est vers l’île de Djerba,
reliée au continent par une chaussée romaine, longue de 7 km . Datant de l’époque punique, elle servait au transport des étoffes
teintes de pourpre et des jarres d’huile.
Ile du sud de la Tunisie , toute plate, le
sol y est rude, l’eau rare et la végétation dispersée. Les murets en terre,
fixés avec des cactus et des figuiers de Barbarie, contiennent les vents
salins.
Pour la plupart berbères, les habitants parlent encore dans certains
villages leur propre langue.
Débarqué dans l’île, il me
faut continuer à pied le long de la route. Des familles travaillent dans les
champs. Des enfants inoccupés, intrigués et provocateurs me lancent des
pierres. Au bout d’un moment - la patience a des limites - je m’arrête, fouille dans ma besace et en
ressort un couteau à cran d’arrêt, dont la lame luit au soleil. Le petit peuple
s’éparpille… Pas très rassuré tout-de-même, je m’éloigne rapidement.
On me charge jusqu’à Houmt-Souk, la seule vraie ville de
l’île.
Je me promène en ville, dans
les rues et les souks. Je ne sais pas où je vais dormir.
Dans la soirée, je rencontre
un jeune Tunisien, très amical, qui cherche le contact et m’invite à manger au
restaurant. Nous discutons beaucoup. Il m’héberge alors chez lui pour la nuit,
dans sa petite maison blanchie à la chaux.
Mercredi 18 avril 1973
Mercredi 18 avril 1973
Je dors jusqu’à 11h. Mon hôte est déjà parti. Nous avions convenu la veille d’un endroit où laisser
L’après-midi, à nouveau en
bord de route, je retrouve les deux Français de Gabès. Nous parcourons l’île en
voiture de louage : arrêt au village de Hara Srhira, et visite de la synagogue de la Griba , devenue un centre
spirituel pour l’étude de la Torah. Un
vénérable barbu nous fait pénétrer. Décoration superbe (murs, vitraux et
plafond).
L’île abrite une petite communauté juive, l’une des plus anciennes du
monde. Ici, juifs et musulmans ont toujours vécu ensemble en bonne
intelligence.
Nous faisons également une
halte au village de Guellala
(poteries, tissages).
Dans la soirée, je repars seul
vers Gabès. J’y arrive vers 22h30. Il fait nuit, et l’auberge de jeunesse est
fermée. Je trouve tout de même un petit hôtel pour passer la nuit.
Jeudi 19 avril 1973
Jeudi 19 avril 1973
Au matin, je retourne à l’auberge de jeunesse et j’y dépose mon sac à dos.
A 11h, je prends un autobus
local pour me rendre dans le djebel, à Matmata.
Pendant le trajet, une femme voilée m’observe intensément…
Matmata est un village
berbère troglodytique, au milieu des collines dénudées au ton ocre.
Paysage tourmenté percé de trous et de cavités.
Pour se protéger des envahisseurs, la population s’est enterrée. Elle
a creusé des cavités dans la roche tendre au fond de puits de 5 à 10 mètres . On y accède
par des tunnels creusés dans le talus ou directement par des échelles. Je visite une de ces habitations
souterraines. Le fond du cratère est percé de niches servant de magasins à
provision, de greniers ; et les pièces d’habitation s’enfoncent profondément
dans le sol. Poules et canards entrent et sortent. Les habitants sont
accueillants et font visiter volontiers leur demeure. Je laisse mon obole.
Je mange un sandwich
tunisien (thon, tomates, piment, huile d’olive) acheté sur le site et je rentre
en bus à Gabès pour 14h.
Je termine l’après-midi à
l’auberge de jeunesse.
Le soir, je vais manger dans
un restaurant avec quatre Françaises rencontrées à l’auberge. Nous allons
ensuite nous promener à la plage, au bord de la mer, dans la douceur de la nuit
du Sud, avant de rentrer nous coucher.
Vendredi 20 avril 1973
Vendredi 20 avril 1973
J’envisage de partir en stop vers Tozeur et la frontière algérienne, à travers le désert. J’y renonce assez vite ! Et à 9h, j’entame mon voyage de retour Gabès – Tunis en auto-stop. Ça marche assez bien.
Vers le nord, avec des
Français qui m’ont chargé dans leur voiture, on s’arrête au djebel Zaghouan : C’est de Zaghouan, l’antique Zita, que
partait l’aqueduc long d’une centaine de km alimentant la ville de Carthage. En
continuant à pied par un sentier, on visite le temple des Eaux, bassin
collecteur en forme d’hémicycle construit en 130 par l’empereur Hadrien.
On arrive à Tunis à 17h. [J’ai
parcouru en tout 1200 km
en auto-stop.] Je regagne Ez-Zahra par autobus. Je passe la soirée dans le
village avec Jellel et des copains. Puis je regarde la télévision chez Tayeb.
Samedi 21 avril 1973
Samedi 21 avril 1973
La matinée, j’occupe mon temps à flâner dans le village. L’après-midi, je reste à la maison avec Monia, puis je vais faire un tour en voiture avec Jellel à Hammam-Lif, et ensuite je passe chez des voisins.
Le soir, on regarde la télévision.
Dimanche 22 avril 1973
Dimanche 22 avril 1973
Nous allons manger pour midi à Tunis chez une des sœurs d’Hichem.
A 16h45, toute la famille me
conduit en voiture à l’aéroport.
Adieux sympathiques et
chaleureux.
L’avion décolle à 17h30 et
se pose à Marseille-Marignanne à 18h45. Je rejoins la ville de Marseille en
autobus où je vais passer la soirée avec mes parents et Gilbert.
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